Charte du Gps
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Charte du Pêcheur de Truites

L'idée de ce document est de proposer un comportement de pêche actif, responsable, et adapté aux notions modernes d'environnement, tout en étant simple, efficace, immédiat à mettre en œuvre, et à la portée de chacun de nous.

La rivière, milieu vivant

Une rivière, c'est un écosystème, un équilibre vivant, en perpétuelle adaptation.

Tous ses éléments sont indissociables, et ne peuvent fonctionner qu'en très étroite collaboration:

  • les végétaux maintiennent la cohésion des berges, règlent l'ensoleillement de la rivière, ménagent des aires d'habitat pour la faune,

  • les micro-organismes digèrent les déchets organiques animaux et végétaux,

  • les méandres du lit et les zones humides régulent l'écoulement de l'eau, limitent les crues, permettent le renouvellement des nappes phréatiques.

Tous les animaux et végétaux s'assurent mutuellement leur continuité alimentaire.

La rivière vit, bouge, s'adapte, évolue, et c'est activement qu'elle développe ses capacités d'auto épuration et de renouvellement, à condition qu'un de ses constituants ne soit pas artificiellement modifié au delà d'une certaine limite.

En effet, la qualité et la densité en salmonidés des cours d'eau de 1re catégorie sauvages diminue au fil des années pour des raisons diverses. Certaines sont bien connues de tous: altération de la qualité de l'eau, destruction des sites de reproduction, modifications du milieu.

Or depuis une quinzaine d'années, un nouveau concept commence également à s'imposer dans les réflexions autour de la gestion d'un cours d'eau; il semble que le prélèvement effectué par les pêcheurs eux mêmes soit une des causes principales du dépeuplement des rivières.

Le capital d'une rivière n'est pas inépuisable, et la fréquentation toujours croissante des cours d'eau conjuguée à l'efficacité des techniques modernes de pêche peuvent vider une rivière en quelques mois si les règlements ne sont pas adaptés.

Pour s'en convaincre, il suffit de se pencher au dessus d'une section de cours d'eau mise en réserve, où les poissons sont, toujours nombreux et de belle taille: la même eau, la même rivière, le même environnement écologique... mais pas de pêcheurs. Les poissons ne s'y trompent pas, et en amont ou en aval de la réserve, la rivière semble étonnamment vide.

De même, les exemples de gestion en «no kill» de certaines portions de rivières montrent que la densité et la grosseur des prises augmentent considérablement du fait de la remise à l'eau des poissons.

Dix poissons par jour et par pêcheur, une maille à 18 centimètres: pouvons-nous prétendre à une gestion piscicole cohérente de nos propres cours d'eau dans ces conditions?

Je prélève au maximum 3 poissons par jour

Depuis des décennies déjà, on ne pêche plus en rivière pour se nourrir. Ce n'est plus le nombre de poissons qui fait la fierté du pêcheur: c'est leur taille.

 Toutes les études de milieu démontrent clairement que le prélèvement maximum acceptable est de 3 poissons par jour et par pêcheur.

 En effet, malgré un taux d'émergence (nombre d'embryons éclos par rapport au nombre d'œufs) assez élevé, la mortalité naturelle de la truite est très importante; au cours de la première année, seulement 5 à 7 % des embryons survivront. Puis, chaque année, le taux de mortalité est de 50 %, ce qui signifie que la moitié des truites meurent naturellement d'une année sur l'autre.

 Le prélèvement de pêche vient donc s'ajouter à une sélection naturellement sévère et peut facilement déséquilibrer toute la fragile chaîne bio-écologique du cours d'eau.

 Le congélateur doit être banni de l'univers du pêcheur moderne; il est attristant de métamorphoser des poissons sauvages aussi précieux en blocs rigides, difformes et plastifiés, dont il n'est pas rare que nous leur fassions prendre le chemin de la poubelle lors du nettoyage annuel...

 Le congélateur incite à l'accumulation et nous fait perdre la notion de quantité et de disponibilité immédiate, seul garant d'un prélèvement raisonnable.

 Ne pêchons pas comme nous faisons nos courses en grande surface; mangeons le jour même les poissons que nous pêchons, c'est le moindre respect que nous leur devons.

Je remets vivant à la rivière les poissons que je ne conserve pas.

Pour redonner sa liberté à un poisson, soit parce qu'il est petit, soit parce qu'on n'a pas envie de le tuer, certaines précautions sont indispensables, sous peine de (ne pas) voir le poisson mourir quelques minutes ou heures après avoir regagné le courant en pleine santé apparente.

J'utilise des hameçons sans ardillon.

L'ardillon est un dispositif traditionnel et fort ancien, indispensable pour pêcher le tarpon, le steelhead ou le saumon, poissons très puissants aux lèvres solides. Mais il est absolument inutile pour la truite ou l'ombre, quelle que soit la pêche pratiquée (à la cuillère, au vairon mort, au toc, à la mouche, etc.. .).

Au contraire, l'ardillon gêne la pénétration de la pointe et occasionne des ratés au ferrage.

Un hameçon sans ardillon pénètre plus facilement et plus profondément.

Les décrochages sont toujours dus à une mauvaise accroche de l'hameçon, qui a insuffisamment pénétré ou s'est. placé trop au bord de la gueule; même si la ligne est détendue, un poisson bien ferré, avec un hameçon sans ardillons correctement placé, ne se décroche jamais.

De plus, sans ardillon, même les plus petites truitelles peuvent être facilement décrochées et remises à l'eau avec une survie quasi certaine et... « avec toutes leurs dents ».

Ecrasez l'ardillon à l'aide d'une pince plate ou montez des hameçons sans ardillon (la tradition est tenace, mais il est de plus en plus facile de s'en procurer dans le commerce).

Je m'efforce de ne pas sortir le poisson de l'eau.

Les organes internes du poisson sont d'une extrême fragilité. Son organisme est conçu pour évoluer dans l'eau, où il n'a pas de poids (de même densité que l'eau, le corps du poisson est en quasi apesanteur). Sortir un poisson hors de l'eau, surtout s'il est de belle taille, c'est l'exposer à une soudaine compression de ses organes vitaux par le poids de son propre corps.

 De plus, la peau est recouverte d'un mucus qui, outre ses propriétés hydrodynamiques (glissement dans l'eau), forme une barrière protectrice contre les infections et les parasites. Avant de toucher un poisson, il faut toujours se mouiller la main.

A chaque fois que c'est possible, décrochez le poisson sans le toucher ni le sortir de l'eau: sans geste brusque pour ne pas l'effrayer, descendez votre main le long du bas de ligne jusqu'à l'hameçon, que vous détachez en le retournant d'un coup sec. Si vous préférez, utilisez une petite pince ou un dégorgeoir tubulaire comme il en existe depuis peu.

 Je ne serre jamais le poisson.

 Tenter de rattraper à la main un poisson qui s'échappe, maintenir un poisson qui se débat pendant qu'on le décroche sont des manœuvres très traumatisantes.

Pour calmer un poisson qui s'agite, placez votre main sous son ventre.

 Je ne touche jamais ses ouïes.

 Les ouïes, ce sont les poumons du poisson. La circulation sanguine y est très riche. La moindre lésion de ce fragile organe entraîne la mort du poisson.

 Si 1'hameçon est engamé profondément et que vous estimez ne pas pouvoir le décrocher sans danger pour le poisson (cela arrive très fréquemment avec les truitelles), coupez le fil au ras des lèvres. Le poisson saura très bien se débarrasser tout seul de l'hameçon ou vivre avec.

Les séances de vivisection au bord de l'eau sont parfaitement inacceptables, et tous les prétextes avancés ne sauront justifier la paresse du pêcheur qui sacrifie inutilement un poisson - souvent immature - pour ne pas avoir à refaire son bas de ligne: paradoxalement, et de très loin, ce sont les jeunes poissons qui ont les meilleures chances de survie.

Le poisson doit toujours repartir de lui-même.

Laisser partir à la dérive un poisson inerte, c'est lui laisser peu de chances de survivre. Au besoin, on peut ré-oxygéner un gros poisson à bout de souffle en le tenant doucement par la queue, et en lui faisant faire des mouvements de va-et-vient afin de créer un courant par les ouïes.

Dans tous les cas, attendez le temps qu'il faut, en le soutenant, tête face au courant, jusqu'à ce que, d'un franc coup de queue, il s'éloigne de lui-même.

Je ne prélève des que des poissons dépassant largement la taille réglementaire.

Une truite qui n'est pas encore en âge de se reproduire est appelée «juvénile»

On peut parfois la reconnaître aux taches bleuâtres qu'elle porte sur les flancs et qui ressemblent à des traces de doigts.

C'est à partir du deuxième frai que la truite commence à se reproduire efficacement. Elle est alors âgée de 3 à 4 ans.

Or, dans une rivière de plaine de moyenne importance, une truite de trois ans mesure entre 25 et 30 centimètres.

Même si l'on tient compte que la taille du poisson varie, pour un âge donné, en fonction de la rivière où il vit (on ne peut pas comparer un torrent de montagne coincé entre deux barrages et un fleuve de plaine), la taille réglementaire est, dans l'immense majorité des cas, très sous-évaluée (de 25 cm à. .. 18 cm dans certains départements) et dépend bien plus des habitudes de pêche locales que de la capacité biogénique du cours d'eau.

Prélever les poissons dès qu'ils «font juste la maille», c'est;

  • priver la rivière de ses capacités de reproduction naturelle,

  • aboutir à un cheptel qui se compose majoritairement de petits poissons, juste en dessous de la taille légale,

  • condamner le cours d'eau à des alevinages permanents, coûteux, pour maintenir artificiellement un cheptel de poissons d'élevage nés en pisciculture et qui n'auront que le temps de grossir un peu avant d'être pêchés...

 En ne prélevant que des poissons qui dépassent largement la taille autorisée, nous conservons intact le potentiel de reproduction de la rivière, seul garant d',un cheptel de qualité.

Je respecte les autres utilisateurs de la rivière qu’ils soient pêcheurs ou non.

Entre pêcheurs, il existe des règles de conduite bien connues de tous, et de bon sens: pour

dépasser un pêcheur qui remonte la rivière, par exemple, il faut marcher le plus loin possible de la berge, sans bruit, et rejoindre l'eau très largement en amont.

De même, pour dépasser, en remontant, un pêcheur qui descend, il faut lui préserver un large secteur à son aval.

 Il est stupide de penser qu'un pêcheur à la mouche nécessite plus d'égards qu'un pécheur utilisant une autre technique, quelle qu'elle soit: un poisson dérangé boudera la cuiller autant que la mouche sèche ou le ver...

Ce n'est pas le mode de pêche qui est dévastateur ou sportif: c'est l'esprit dans lequel le pêcheur l'exerce.

 En outre, nous, les pêcheurs, n'avons pas plus de droits sur la rivière que les kayakistes, les

promeneurs, ou les baigneurs. Cependant, les droits sont indissociables des devoirs, et tous les utilisateurs de la rivière doivent se rappeler mutuellement les principes élémentaires de respect et de protection de l' environnement.

De nombreux combats doivent encore être menés, et tous les amoureux des rivières, quelle que soit leur activité, peuvent être des alliés potentiels dans nos efforts de réhabilitation de la qualité des cours d'eau.

 Il serait vraiment dommage de se tromper d’ennemi….

Je rapporte, à chaque sortie, au moins un déchet trouvé au bord de la rivière.

 

Inutile de se lamenter sur la négligence des promeneurs. . . ou des autres pêcheurs; il faut passer à l'action.

 On trouve toujours, au cours d'une sortie de pêche, divers objets abandonnés, pas forcément volumineux, mais toujours disgracieux et visibles de loin, dont l'absence permettrait à la rivière de reprendre un aspect un peu plus sauvage.

 Il est facile d'ajouter aux préparatifs un petit sac en plastique spécialement réservé à accueillir un de ces déchets en cours de pêche. Ramené à la maison, et déposé dans la poubelle domestique, ce déchet, temporairement égaré dans le paysage, pourra reprendre, tranquillement, avec ses congénères, la chaîne de retraitement des ordures ménagères.

 Une action fort simple et sans prétention, mais extrêmement efficace si chacun de nous y pense à chaque fois.

 

 Groupement des Pêcheurs Sportifs Dauphiné 

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